« La Grèce résoudra en profondeur ses problèmes non pas en restructurant la dette, mais en restructurant le pays ». Voici donc comment le Premier ministre grec a accueilli les rumeurs d’une prochaine restructuration. Il s’agit là d’une déclaration volontaire et qui fait sens. Hélas, la crédibilité de celui qui l’énonce nous retire toute illusion. Voici un peu plus d’un an, nous nous faisions pourtant optimistes quant au potentiel de redressement du pays. C’était sans compter sur la lâcheté des politiques et leur incroyable absence d’intérêt pour l’avenir de leurs compatriotes.
Les ponce pilate des temps modernes
En 2010, la Grèce a fait des efforts.
En effet, si son déficit annuel est ressorti au-delà des 8 % (source gouvernementale), c’est essentiellement en raison des intérêts payés sur sa dette. « Le déficit primaire n’a atteint que 1,5 % », s’est félicité l’exécutif. Et alors ? Croit-il réellement que les désastres causés par vingt ans de corruption et de gestion politicienne peuvent être résolus par une simple diminution du déficit ? Athènes n’avait pas le choix et se devait de dégager un excédent pour démontrer sa capacité de réaction. Malheureusement, le gouvernement n’y est pas parvenu. Les impôts ont certes été relevés et de nouvelles taxes créées. Mais dans les faits, la levée de l’impôt reste toujours aussi problématique et les recettes budgétaires n’ont grimpé que de 6 % en 2010. Le potentiel était pourtant bien plus élevé ! Lorsque l’on sait que certaines catégories professionnelles ne déclarent toujours rien au titre de l’impôt sur le revenu, il apparaît que la hausse de la pression fiscale est subie par une minorité, celle qui déclarait déjà ses revenus avant la crise... Du côté des dépenses, le gouvernement n’a toujours pas eu le courage de s’attaquer aux foyers de pertes que sont par exemple les transports publics. Ces derniers auraient déjà dû être privatisés, ce qui aurait réduit le déficit et accru les recettes. De nouvelles mesures doivent toutefois être annoncées au lendemain du week-end pascal. Pourquoi pas avant ? Parce que les élus du Parlement, de retour dans leurs circonscriptions pour les fêtes, voulaient éviter d’être confrontés à la vindicte populaire. Quel sens des priorités et de l’urgence...
La restructuration est intégrée par les marchés
Dans ces conditions, une restructuration de la dette hellénique semble désormais inévitable. Si les politiques affirment le contraire, les marchés l’ont déjà intégrée : les obligations grecques affichent en effet une décote de 50 % tandis que les emprunts à 30 ans résistent mieux que ceux dont la maturité est inférieure à 3 ans. En réalité, les investisseurs sont déjà passés à l’étape suivante. Selon une récente étude de Citi, la restructuration constitue un moindre mal à court terme. Si les créanciers n’acceptent pas maintenant un « haircut » (un défaut partiel) à hauteur de 52 % afin de ramener le déficit du pays à 90 % du PIB (contre plus de 150 % actuellement), la banque américaine estime qu’ils devront subir une perte de 70 % en 2015... afin d’obtenir le même résultat. Pour la Grèce, la restructuration constitue également la seule solution pour réduire le poids des intérêts et affronter la fin en 2013 de l’aide concoctée par le FMI et l’Union européenne. Concrètement, ces derniers devraient d’ailleurs bientôt montrer la voie en acceptant une baisse du taux d’intérêt imposé à Athènes et un rallongement de la durée de remboursement.
Les banques européennes seront bien évidemment touchées par une restructuration. Le renforcement récent des fonds propres précédant l’instauration des ratios de Bâle III devrait toutefois permettre au secteur d’encaisser le choc. à plus long terme, de telles pertes vont conduire les établissements à plus de prudence, ce qui aura indirectement pour effet de réduire l’accès à la dette pour les autres états européens. Ces derniers devront enfin prendre des mesures de rigueur. Une bonne chose !
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