Aux Etats-Unis, « récession » est un terme qu’aucun responsable politique ne souhaite prononcer. Les récessions sont jugées inavouables dans un pays qui a presque fait de la croissance un « style de vie ». S’amusant de ces pudeurs langagières, des commentateurs ont trouvé un moyen pour le moins astucieux de contourner cette difficulté. « Récession » est donc devenu « le mot en R »... Tous savent de quoi il s’agit, mais qu’importe ! La France possède également son « mot en R ». Mais le « R » du mot qui doit être tu renvoie ici à « rigueur » et non plus à « récession ». Dans l’Hexagone, le terme « rigueur » est donc consciencieusement passé sous silence. Plus grave, toute politique qui emprunterait à la « rigueur » est considérée comme tabou. Et qu’importent les nécessités du moment : « la politique ne consiste pas à régler les problèmes mais à éviter qu’on en parle », disait en son temps Henri Queuille. Face à la crise qui touche l’Europe, asphyxiée par un endettement public que tout responsable sait ne plus être soutenable, le discours de vérité qui consisterait à s’attaquer aux dépenses de l’Etat est occulté par les membres de la classe politique française, quel que soit leur positionnement sur l’échiquier. Alors que nos voisins s’attaquent en toute logique aux dépenses de l’Etat, pour ceux qui avaient encore tardé à le faire, les responsables politiques français décident, une fois encore, de faire cavalier seul. Là où l’Italie annonce un plan de rigueur portant sur 40 Mds €, la France se contente de raboter quelques niches fiscales afin d’augmenter les recettes et poursuivre ses maigres efforts en termes de dépenses dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP). L’objectif reste d’ailleurs le même : geler les dépenses de l’Etat par rapport à leur tendance « naturelle » qui les conduit à s’apprécier encore et encore. En d’autres termes, maintenir les dépenses publiques sur le niveau qui est le leur. Quel volontarisme ! François Baroin, notre nouveau ministre de l’économie, a d’ailleurs tenu à rassurer les parlementaires : il n’y aura pas en 2012 de grandes mesures d’économies sur les dépenses de l’Etat. Quant à couper dans les interventions de ce dernier, nous en sommes évidemment bien loin. La France fait donc le dos rond en espérant être épargnée par l’orage qui gronde à ses portes. Cette posture est évidemment liée aux enjeux électoraux à venir. Mais pas seulement. Les Français ne veulent pas entendre parler d’économies, c’est un fait. Compte tenu de nos finances, ils entendront alors très prochainement parler d’impôts.
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