vendredi 4 mars 2011

Les marchés émergents (BRIC) ont-ils encore le vent en poupe ?

Sur les marchés occidentaux, les troubles politiques frappant le Maghreb et le Moyen-Orient ont déclenché une consolidation. Cette dernière, qui était par ailleurs techniquement devenue inévitable, demeure pour l’instant modérée. Sur les places émergentes, les conséquences des révoltes tunisienne, égyptienne, libyenne ou encore bahreinie s’avèrent en revanche d’ores et déjà bien plus importantes. Au-delà des considérations propres au marché pétrolier (va-t-on assister à une rupture de l’approvisionnement ?) ou aux entreprises (quid des investissements réalisés et des revenus générés dans ces pays ?), ces évènements vont remettre en question le statut privilégié des marchés émergents. Au cours des dernières années, les investisseurs ont en effet occulté le « risque pays » pour faire du « nouveau monde » leur marotte. Alors que les poussées inflationnistes des dernières semaines les incitaient déjà à corriger cet emballement, la cote des émergents va continuer de baisser, du moins pendant un certain temps. Les géants que sont les BRIC ne devraient pas être épargnés.

La chine poursuit son chemin

La grogne sociale couve déjà depuis un certain temps en Chine. Quel investisseur peut affirmer avec certitude que le pouvoir en place ne sera pas contesté au cours des prochains mois ? Et ce alors même que l’inflation complique chaque jour un peu plus la vie du milliard de chinois qui ne profitent pas de la croissance. Fin février, la Banque Populaire de Chine a une nouvelle fois et sans surprise durci sa politique monétaire en relevant de 50 pts de base les ratios de réserves obligatoires des établissements bancaires. Son objectif reste d’éviter un dérapage des prix et de mettre fin à la bulle immobilière en bon ordre. La Réserve fédérale américaine a suivi le même chemin entre 2004 et 2007 avec le succès que l’on connaît... Bien que les économistes, affiliées ou non à Pékin, plébiscitent le savoir-faire des autorités, la Chine ne peut, selon nous, se sortir du piège dans lequel elle s’est enfermée. Le cycle de resserrements monétaires va donc se poursuivre... jusqu’à ce la première crise issue de son capitalisme dirigiste éclate véritablement. En attendant, la prudence l’emporte déjà chez les spécialistes de la région. Le stratégiste de la Banque HSBC à Hong Kong estime pour sa part qu’il faudra attendre jusqu’au 2ème semestre de 2011 avant que la Bourse n’encaisse les effets du durcissement monétaire actuel.

Inde, la lanterne rouge

L’inflation constitue le pire cauchemar de l’Inde, un pays où l’approvisionnement en denrées alimentaires est un défi quotidien, et ce même lorsque la croissance du PIB atteint 10 %. Logiquement et face à une inflation dépassant les 8 %, les investisseurs ont donc pris le parti de fuir la Bourse de Bombay : ils ont ainsi retiré 1,7 Md $ du pays depuis le début de l’année. Il est vrai que les actions indiennes avaient « surperformé » en 2010 pour afficher des valorisations largement supérieures à la moyenne mondiale. La Reserve Bank of India est toujours engagée dans un cycle de resserrements monétaires qui pourrait, au final, conduire à un net ralentissement de l’économie. Dans le même temps, le trop lent développement industriel ne permet pas d’absorber l’afflux de paysans sans emploi.

Brésil : en lutte contre l’afflux de capitaux

Créé en 2008, le fonds souverain du Brésil est désormais autorisé à réaliser des opérations sans limites sur le marché des changes en vue de freiner la hausse du real. Les investisseurs empruntent en effet à bon compte aux Etats-Unis et en Europe pour ensuite placer leurs liquidités au Brésil où la rémunération est très attractive (11,25 %). Ce phénomène, qui va bien au-delà des qualités de l’économie brésilienne, constitue un handicap pour l’excédent commercial du pays qui a d’ailleurs atteint un plus bas de huit ans. Face à une inflation de 5,9 %, le pays ne peut pourtant assouplir sa politique monétaire. Dans ce contexte, la Bourse tend à corriger.

La Russie est discrète

Comme l’ensemble des pays émergés ou émergents, la Russie souffre de l’inflation qui devrait dépasser 7 % en 2011. Pour autant, les investisseurs ne s’en inquiètent pas outre-mesure. L’inflation est en effet en partie liée à la flambée des cours du pétrole qui constitue le moteur de l’économie. Alors que les actions russes restent les moins valorisées des BRIC, la Bourse se distingue depuis le 1er janvier. 

Les actions des pays émergents et notamment des BRIC n’affichent pas de valorisation excessive pour un environnement normal. Mais si l’inflation dérape, le désaveu sera sévère.

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